La Pars urbana (secteur 1 de la fouille)
Il s’agit ici de décrire les principaux éléments de cette partie du site à son extension maximale vers 200 ap. JC (cf. historique).
La galerie de façade (espaces 35, 33, 32 et 31)
La colonnade
Il s’agit d’une transformation majeure qui intervient après le milieu du IIe siècle ap. JC (vers 150-160) avec la volonté de monumentaliser la façade orientale de la maison du maitre. Les pavillons de cette façade sont ainsi reliés par un portique à colonnade en pierre de taille d’ordre toscan provincial. Ce renforcement prestigieux de la façade orientale tournée vers la voie qui passe à proximité, pourrait évoquer une mutation de la maison vers un établissement du type auberge mais cela reste une supposition.
Les colonnes reposent sur un soubassement composé de blocs de grès de gros appareil dont 13 sont encore en place dont la largeur moyenne est de 0,60 m. (soit l’équivalent de 2 pieds romains) pour une longueur qui varie de 0,50 à 1,40 m. Ils ont été réalisés sur mesure. L’assise supérieure de ces blocs dépassait de 0,20 m le niveau de circulation.
Seuls deux blocs de grès situés au milieu de la galerie sont placés au ras du sol ce qui évoque un seul d’entrée. Ils comportent des croix de positionnement.
Tous les blocs situés au nord de la galerie ont été récupérés et il ne reste que la tranchée de fondation. Tout le sol de la galerie était en béton ou terrazzo (chaux + cailloutis calcaire) coulé sur un radier de pierre encore bien visible aujourd’hui dans différents endroits du secteur préservé.
Ces blocs servaient à soutenir des colonnes comme le montre les traces d’épannalage de 0,48 cm de diamètre bien visible sur les blocs qui recevaient ces colonnes, comme par exemple le bloc d’angle situé en face de la descente de la cave. D’après les traces retrouvées sur les blocs, il devait y avoir 13 colonnes, l’entrée devait être monumentalisée par un système de double colonnes (cf. aquarelle partie « Décor d’enduit peint au centre de la galerie »). Les colonnes devaient mesurer 2,68 m (soit 8 largeurs de fût) pour un diamètre de 0.313 m (0.48 m à la base). La base comme les chapiteaux sont de style toscan provincial (appelé aussi ordre dorique romain).
Les encoches visibles sur la base et le chapiteau retrouvés, peu esthétiques, évoquent des mortaises destinées à recevoir des cloisons boisées pour isoler des intempéries une partie de la galerie de façade.
Les fouilles ont mis en valeur l’existence d’un caniveau qui bordait cette galerie et qui recevait les eaux de pluie du toit de la galerie.
La cuisine
La fouille a révélé qu’en bordure du mur du pavillon sud de la façade, il existait une fondation rectangulaire avec des traces de rubéfaction. Cette fondation pourrait correspondre à une batterie de cuisson où se trouvaient différents foyers pour la préparation des repas. Ainsi, l’angle sud-est de la galerie de façade (appelé espace 35) pourrait être une cuisine et cela est corroboré par la présence de nombreux objets abandonnés lors de l’incendie de la villa. C’est là que furent notamment retrouvés le chaudron en bronze (voir Les objets divers) et une coupelle en sigillée entière.
Le décor d’enduit peint au centre de la galerie
La rampe d’accès à la cave a piégé des éléments d’enduit peint qui se sont effondrés après l’incendie de la maison. Ils ornaient le mur arrière de la zone médiane de la galerie soit, juste en face de l’entrée (espace 32).
Les décors s’organisent sur des panneaux rouges, alternant avec des inter-panneaux noirs séparés par des bandes blanches. L’un des inter-panneaux est orné d’un candélabre végétalisé vert, blanc et rouge. Les inter-panneaux noirs étaient décorés de candélabres végétalisés verts et la frise noire supérieure, surmontée d’une fausse moulure, était animées de motifs où figure un cygne.
En Gaule romaine, ce type de décor orne souvent les pièces secondaires et les couloirs entre la fin du Ier et le milieu du IIe siècle.
Le pavillon sud (espace 34)
Ce pavillon fut construit entre la fin du Ier siècle et le début du IIe siècle et possédait uniquement un rez-de-chaussée. La suppression de la cave augustéenne au profit d’un espace balnéaire a entraîné la construction d’une cave dans le courant du IIe siècle. Mais, pour éviter l’effondrement des maçonneries, les anciens murs en dolomie (pierre blanche) sont doublés par une maçonnerie essentiellement en grès reposant directement sur la dalle de grès naturelle.
Elle mesure 1,60 m de profondeur pour un espace de 9,50 m² (3,50 m / 2,70 m). Elle devait être planchée pour isoler les denrées alimentaires de l’humidité. En effet, un petit canal est creusé contre les murs est et sud, avec un drain (recouvert de tuiles creuses) avec un siphon dans le tiers ouest, pour évacuer l’eau d’une petite source qui sourde lors de fortes pluies à la base du mur est.
Le mur sud possède un soupirail, en position centrale, dont l’embrasure est bien conservée. Il sert à l’éclairage naturel et à l’aération de cette cave destinée au stockage des denrées alimentaires.
On y accède par un escalier construit dans l’angle nord-est, composé de 7 marches de grès de 1,20 m. par 0,30 m d’environ 11 cm. d’épaisseur. La pierre de seuil présente des encoches de chaque côté destinée à recevoir l’encadrement de la porte en bois dont les traces sont aussi visibles par un décrochement dans les maçonneries qui bordent cette pierre de seuil.
Ce qui se trouvait au-dessus de la cave fut découvert dans le comblement de la cave, l’incendie ayant entrainé la destruction du plancher de cette pièce. Il y fut retrouvé une table ronde en grès (voir les éléments lapidaires), des plats à cuire, une cruche en alliage cuivreux, un plat percé à pied aussi en alliage cuivreux, des jattes, gobelets, mortiers… tout le nécessaire à la préparation des repas, et ce, en lien avec la cuisine située à proximité. Le pavillon sud servait donc au stockage des denrées alimentaires et des ustensiles de cuisines.
Le pavillon nord (espace 30)
Il est de même plan que l’espace 34 et construit en même temps, il offre une superficie de 19 m² (4,80 par 3,90 m). Si son niveau de sol a disparu aujourd’hui, il ne reste de cet espace qu’un niveau semi-excavé correspondant à la mise en place d’un hypocauste. Le vide sanitaire mesure 0,45 m. d’épaisseur et le sol de la pièce reposait sur des pilettes dont sont encore visibles quelques emplacements. Les murs sont enduits de mortier de tuileau.
Pour chauffer la pièce, un alandier, sans doute voutée, a été percé dans la maçonnerie nord. La sole mesure 1,14 m de long pour 0,47 cm de large et le canal de chauffe est formé de briques de terre cuite (40 / 23 cm).
Il n’existe pas de praefurnium pour cet alandier, il devait juste être aménagé, contre le mur nord, un appentis révélé par une couche charbonneuse de forme ovoïde directement contre le mur.
Les remblais de démolition du niveau supérieur révèlent des fragments d’enduits peints qui indiquent que cette pièce chauffée par le sol était sans doute une pièce de réception ou encore un triclinium.
Ce pavillon a subi une réfection totale au cours du IIe siècle comme le montrent deux indices importants :
° Le premier est le doublement de la maçonnerie de la fondation de la pièce qui indique une reprise de maçonnerie. La photo ci-dessous montre au premier plan, la reprise de maçonnerie en calcaire bleu et collé derrière, le premier mur en dolomie avec un enduit en mortier de tuileau.
° Le second est le changement de matériau pour la construction qui, de modules de moellons en dolomie passe à des moellons en calcaire à gryphae comme le montre ce moellon avec un fossile d’ammonite.
Les espaces 36 et 25.
L’extension vers l’est du pavillon nord (espace 36).
Concomitamment à la réfection de l’espace 30, un nouvel espace est créé en façade orientale du pavillon nord. De plan carré de 13,30 m² (5,30 / 4,50 m), les maçonneries sont chaînées sur trois côtés (nord, est et sud) et viennent s’appuyer contre le mur est de l’espace 30.
Les angles de la façade orientale présentent deux gros blocs en grés taillés qui pourraient servir à soutenir un pilier évoquant alors un espace ouvert vers l’est. L’utilité de cette pièce pourrait être mis en rapport avec les nombreux rejets de repas et de vaisselles trouvés en bordure orientale de cette espace. Il pourrait s’agir d’une pièce de réception d’été, rafraîchit par sa position nord-est de la domus. Le sol de cette pièce est composé d’une couche de terre très compacté sur laquelle il fut placer un radier de pierres et des morceaux de terrazzo avec de la terre cuite, qui pourraient provenir de la démolition du sol de l’espace 30. Des morceaux très plats évoquant une surface de circulation ont été retrouvés (cf. image). Le tout devait être recouvert d’un béton de sol à la chaux.
L’espace 25.
Directement contigu au mur ouest du pavillon nord (espace 30), cette grande salle mesure 30 m² de superficie et elle est bordée au sud par un couloir. Ses murs ouest et nord sont totalement récupérés. L’intérêt de cette pièce, dont la destination est inconnue, est qu’elle a gardé son sol d’origine. Il s’agit d’un béton de cailloutis calcaires liés à la chaux reposant sur un radier formé de blocs de dolomies moellon disposés de biais sur une épaisseur de 15 à 25 cm. d’épaisseur. A l’origine, ce sol devait est être parfaitement lisse mais le temps et la faible épaisseur de terre qui le recouvrait (environ 30 cm) ont dégradé cette surface. Elle reste cependant l’unique témoignage d’un niveau de circulation romain.
Cette pièce a aussi gardé des traces d’enduits peints à la base des murs représentant une plinthe rouge de 11 cm surmontée d’un panneau blanc. D’autres fragments d’enduits peints évoquent des décors linéaires rouges, noirs…
Enfin, cette pièce possédait au centre du mur sud, un soubassement de foyer. De plan rectangulaire, cette sole mesure 1 m / 0,95 m est formée d’un fragment de bipédale (dalle de terre cuite) posé sur un lit de mortier de tuileau directement posé sur le sol de la pièce. Il pourrait s’agir d’une sole pour un foyer ou un soubassement de fourneau afin de chauffer la pièce.
A noter que cette bipédale garde la trace d’une chaussure cloutée.